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ATSA à la 10e Biennale de La Havane
Du 27 mars au 27 avril, ATSA y présente BUBBLEGUM CANNONBALLS sous le thème : Résistance et Intégration à l’heure de la globalisation
L’ATSA a pris d’assaut la forteresse El Moro-La Cabaña, « attaquée» par des boulets de canon « rose bubblegum ». Réfléchie spécifiquement pour la thématique et le contexte de la Biennale, BUBBLEGUM CANNONBALLS offre en paradoxe la boule de gomme, symbole de rêve et de légèreté. La « vie en rose » est proposée ici en format boulet de canon, faisant référence aux effets pervers de la surconsommation mondialisée comme arme d’intégration massive en voie de bouleverser l’équilibre culturel et écologique de la société cubaine.
Attention ! Ceci peut vous exploser à la figure…
Diaporama
Photos : © ATSA & Simon Bujold
BANDE SON
Vous écoutez la bande sonore intégrée à la distributrice de boule de gomme.
(6 min. 54 sec.). Merci à Luc Raymond.
journal de bord
Jeudi 19 mars 2009
Arrivés à la Havane que nous n’avions pas revue depuis 10 ans, nous sommes une nouvelle fois conquis! Le passage à la douane se déroule relativement bien avec tout notre arsenal d’intervention et visa spécial. Des gens de la Biennale sont venus nous chercher, on plane!
Le jour même, nous allons découvrir la forteresse El-Moro La Cabaña où nous avons planifié notre « Attentat » de boulets de canon roses, c’est magnifique! Nous entamons une première plantation en soufflant nos ballounes au format boulet de canon pour envahir les lieux. Au final, il y en aura des centaines !
Vendredi 20 mars 2009
plus de ballons… volés ou envolés? Nous perfectionnons notre système d’attache au sol, plantons à des endroits moins fréquentés et demandons plus de sécurité…récidivons.
Samedi 21 mars 2009
Le tout tient formidablement bien mais comme notre projet est à l’extérieur et que la sécurité manque la nuit… la disparition de nos ballons prouve que ce n’est pas le vent qui fait disparaître notre attaque. De plus, malgré le plastique spécial qui est supposé résister au soleil, ils fondent littéralement… le projet est trop éphémère, ça va mal.
Mais, le découragement n’est pas de l’équipe et nous entreprenons une croisade pour faire demander au colonel de la forteresse la permission d’utiliser les vrais boulets de canon, de les déplacer, de peindre une pyramide de boulets en rose ?
Nous aurons notre réponse lundi…
Entre-temps, nous disant qu’une intervention avec les vrais boulets serait probablement impossible, nous en profitons pour magasiner du lycra rose et des ballons de soccer à recouvrir… ce furent de ces beaux moments car nous expliquions notre projets aux gens qui se mettaient à nous parler de Cuba et nous dirigeaient vers un nouveau magasin et la découverte d’un nouveau quartier où nous aurions peut-être la bonne couleur, le bon format de ballon… c’est au coin de Saint Nicolas et Zanjas, dans le Bario Chino que le Lycra rose nous est apparu! Pour les ballons…c’était très coûteux. Décidément, cette solution n’est pas viable, il faudra pouvoir utiliser les vrais boulets…
Lundi 23 mars 2009 - PM
La réponse arrive: JAMAIS !
On ne peint pas des boulets de l’époque coloniale en rose les artistes!
Nous demandons alors de rencontrer le colonel Henri en personne. C’est Miarielis, la coordonnatrice des artistes de la Cabaña, une fille qui se vaudra le surnom de Guerriera del Arte qui réussit à nous avoir un entretien privilégié avec le colonel mardi.
Mardi 24 mars 2009
Pourrions nous les emballer de lycra rose alors mon colonel?
À la base, le projet lui semble trop anti-guerre, on ne peut ridiculiser un passé de la sorte… soit, mais en lui expliquant que le but du projet est une réactualisation de l’objet de guerre vers la nouvelle résistance cubaine à mener, celle de ne pas se faire envahir par la surconsommation et ses saveurs de publicité envahissante, monoculture etc…. cela convainc notre homme et à la fin de tout cela Annie se fait appeler la Colonella par le colonel Henri en personne ! Mais voilà… même si Henri dit oui, il faut l’aval de Ministre du Patrimoine pour toucher à ces boulets… Au secours!
Nous sommes déjà mardi et la Biennale ouvre vendredi…aurons-nous un projet?
Nous apprenons qu’une réunion aura lieu le soir même avec le directeur de la Biennale, M. Rubén del Valle Lantaron … c’est notre ultime chance car lui seul peut solliciter d’urgence une dérogation du Ministre du Patrimoine.
Mardi 24 mars 2009-pm
On se pointe avant la réunion et expliquons notre cas à Rubén qui adore le projet. Il appellera personnellement le Ministre du Patrimoine et nous donnera sa réponse Mañana…
Mercredi 25 mars 2009
De bon matin, nous voilà à la forteresse…
La réponse nous parvient à 13h et c’est OUI!!!
Merci Rubén, Miarielis, Henri, finalement le projet est encore meilleur que l’original. Pouvant intervenir sur l’objet réel, nous n’avons que des bons commentaires et les interprétations sont multiples en plus de notre inspiration de base : certains y voient une main de fer dans un gant de velours (Fidel)… un peu de féminité dans cet univers masculin (la forteresse), le triangle rose est un symbole gai, la monoculture du sucre qui a rendue si vulnérable l’économie de l’île…enfin visuellement cette pyramide de boules de gomme géantes est tout simplement magnifique!
Pour l’inauguration, nous avons distribué des boules de gomme roses, planté nos ballons soufflés à l’entrée de la forteresse et le samedi matin, dans l’illégalité, nous avons placé des ballons soufflés (gonflés) dans les bouches des canons ( ceci avait été refusé par le colonel)… juste pour la photo!
Nous avons rencontré à la Biennale des artistes d’Argentine, du Mexique, d’Espagne, de France, du Pérou, d’Australie, de toutes les Caraïbes, du Royaume-Uni, nous nous sommes fait de véritables amiEs.
Cuba est à la fois un paradis et une prison. La liberté d’expression va nécessairement s’agrandir, les biens et services sont de plus en plus disponibles ainsi que la capacité d'achat et la nouvelle ouverture d’Obama facilite cette ouverture des marchés mais… ne pourrait-on utiliser l’infrastructure de l’embargo et de toutes ces années de résistance pour ne laisser entrer que le meilleur et garder un système où l’éducation et la santé sont au cœur des priorités ? Serait-il possible de ne pas laisser entrer, par exemple, les sacs de plastiques, pesticides et savons à base de phosphate?…Les produits de consommation ne pourraient-ils pas passer par le crible de la trace environnementale avant d’entrer dans l’île ? Pourrait-on instaurer des lois strictes d’urbanisme, au niveau de la pollution visuelle de la publicité, du transport en commun afin de protéger le merveilleux patrimoine bâti ? Car à plusieurs points de vue Cuba a l’infrastructure politique et logistique pour conserver sa portion paradisiaque et n’a pas à réaliser la décroissance que nous avons ici à mettre en place.
ATSA tient à remercier le soutien du Conseil des Arts et des Lettres du Québec